44 % des salariés français ont déjà traversé un épisode d’épuisement professionnel en 2023, selon le baromètre Empreinte Humaine. Ce chiffre, plus élevé que jamais en dix ans de suivi, claque comme un signal d’alarme dans le monde du travail.
Les métiers du soin, de l’enseignement et de la distribution enregistrent des taux qui dépassent parfois la moitié des effectifs. Derrière ces chiffres, des causes multiples : surcharge, manque de reconnaissance, précarité. Le malaise s’installe et creuse l’écart entre les secteurs, laissant le phénomène s’ancrer durablement dans la réalité française.
Le burn-out en France : une réalité qui s’impose par les chiffres
Désormais, le burn-out, ou épuisement professionnel, ne relève plus de l’exception. L’OMS le définit comme le résultat d’un stress professionnel chronique mal maîtrisé. Pour des millions de travailleurs français, il s’invite dans le quotidien. Le baromètre Empreinte Humaine ne laisse rien au hasard : 2,8 millions de personnes, soit 12 % de la population active, se trouvent en situation de risque élevé.
La santé mentale au travail vacille. 61 % des salariés disent ressentir du stress au moins une fois par semaine, 2,5 millions vivent sous tension permanente. Le phénomène explose chez les jeunes : près de 59 % des moins de 29 ans rapportent des signes d’épuisement professionnel. Les femmes, elles, paient un lourd tribut avec 60 % des cas recensés.
Pour donner la mesure de cette vague, voici quelques repères :
- Un cadre sur cinq déclare avoir été touché.
- 34 % des salariés se sentent concernés ou en situation de risque de burn-out.
La facture collective du stress au travail atteint chaque année entre 2 et 3 milliards d’euros, sans compter les coûts directs et indirects qui oscillent entre 830 et 1 656 millions d’euros. Mais derrière les statistiques, les réalités sont âpres : absentéisme, baisse de productivité, détresse psychologique. Les études menées par OpinionWay et l’Institut de veille sanitaire convergent : le burn-out s’impose comme une donnée structurelle du monde professionnel français.
Quels secteurs professionnels affrontent le plus l’épuisement ?
Sur le terrain du travail en France, le risque d’épuisement professionnel ne frappe pas au hasard. Le secteur de la santé occupe la première place : 42 % de ses professionnels vivent sous un hyperstress continu. Médecins, infirmiers, aides-soignants font face à une pression émotionnelle qui ne faiblit pas, aggravée par la surcharge, le manque de moyens et la rareté du soutien institutionnel.
L’éducation n’est pas épargnée. Enseignants et personnels éducatifs absorbent une charge émotionnelle considérable et supportent des responsabilités accrues, souvent sans reconnaissance. Le secteur social, lui aussi, se heurte à des conditions éprouvantes et à une exposition quotidienne à la détresse humaine.
Moins visible, le droit souffre : 64 % des professionnels du secteur dénoncent l’absence de ressources adaptées pour faire face à la fatigue mentale. Dans le secteur des affaires et de l’administration, un salarié sur deux pointe un taux de burn-out élevé, reflet d’une pression constante sur les résultats.
Certains territoires cumulent les alertes : Montpellier (40 %), Brest (23 %) et Dijon (26 %) figurent parmi les villes les plus exposées. Partout, le même mélange : stress chronique, défaillance des dispositifs d’aide, charge émotionnelle persistante. Face à cette réalité, la vigilance et l’action sont de mise dans tous les secteurs concernés.
Facteurs de risque et profils les plus exposés
L’épuisement professionnel prend racine dans un terreau bien connu : charge de travail excessive, pression continue, déficit de reconnaissance et organisation déficiente. Les journées à rallonge, l’omniprésence des outils numériques, l’isolement et la généralisation du télétravail, renforcés depuis la crise du COVID-19, précipitent le malaise. La fatigue s’installe, la détresse psychologique suit, le désengagement s’installe et la frontière entre vie pro et vie perso s’effrite.
Certains profils s’avèrent particulièrement vulnérables. Les femmes concentrent 60 % des situations signalées de burn-out en France (données Santé publique France). Les jeunes actifs sont eux aussi sur la sellette : 59 % déclarent ressentir des symptômes d’épuisement. Les cadres, soumis à une pression constante, ne sont pas épargnés : un sur cinq se dit concerné. Dans le secteur médical, la liste des risques s’allonge : surcharge émotionnelle, violences subies, troubles psychologiques : 58 % des médecins témoignent de difficultés, et 44 % se trouvent en zone de vulnérabilité.
Plusieurs facteurs contribuent à l’installation du syndrome :
- Stress chronique et absence de soutien favorisent l’apparition de l’épuisement.
- Isolement, solitude et perte de repères accentuent le phénomène chez les télétravailleurs et les jeunes arrivants.
- Manifestations : fatigue persistante, nuits agitées, cynisme, démotivation, douleurs physiques.
Le coût social, évalué entre 2 et 3 milliards d’euros chaque année, se traduit par des absences, des arrêts maladie, une productivité en chute et une détresse qui laisse des traces. Au-delà des chiffres, ce sont des trajectoires bouleversées, des parcours professionnels fragilisés.
Prévenir le burn-out : leviers pour les salariés et les employeurs
La prévention du burn-out ne se limite pas à des affiches dans les couloirs ni à de grands discours. C’est une dynamique collective, un engagement partagé. Les actions efficaces s’appuient sur la formation, l’accompagnement et un accès facilité au soutien psychologique. Face à la multiplication des signaux d’alerte, certaines entreprises innovent pour limiter le risque d’épuisement professionnel.
Pour les employeurs, la sensibilisation des équipes dirigeantes et la formation des managers jouent un rôle décisif. Repérer les signes d’alerte, fatigue, isolement, irritabilité, demande une attention constante. Il est indispensable de garantir des dispositifs d’accompagnement psychologique : accessibles, confidentiels, dénués de tout jugement. Ajuster la charge de travail, encourager la déconnexion et rendre les horaires plus flexibles sont des mesures concrètes qui font la différence.
Du côté des salariés, préserver l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle passe par des actions simples : poser des limites, couper les notifications en dehors du bureau, demander de l’aide dès l’apparition des premiers symptômes de stress chronique. Prendre des pauses, exprimer ses difficultés et accéder à des espaces d’écoute deviennent des réflexes de survie.
Voici les pratiques qui font la différence au quotidien :
- Formation continue sur la gestion du stress
- Accompagnement psychologique personnalisé
- Promotion de la déconnexion numérique
- Suivi régulier de la santé mentale des équipes
Prévenir le burn-out, c’est miser sur la responsabilité collective, la clarté et l’action. Il ne s’agit plus de simples promesses : il faut passer aux actes, pour que la santé mentale gagne enfin sa place au centre du jeu.


